« Dans une femme, la science est déplacée » [sic]
Ces mots, que l’on prête à Giacomo Casanova (1725-1798), reflètent l’un des préjugés les plus tenaces qui soit sur les capacités intellectuelles des femmes, à savoir que leur cerveau serait « inapte » à concevoir l’abstraction.
Au XIXe siècle encore, les femmes sont quasiment exclues du monde des sciences et des techniques au nom de leur soi-disant infériorité naturelle. Seules quelques intellectuelles de l’aristocratie éclairée – à l’image d’Ada Lovelace, pionnière de l’informatique – contribuent aux progrès et participent aux débats scientifiques. Mais, la plupart sont réduites à n’occuper que des postes ou à n’effectuer que des tâches subalternes. À la fin du siècle, les pays européens démocratisent l’accès à l’instruction et on observe, certes, une augmentation du nombre d’étudiantes et de chercheuses. Mais, les préjugés sexistes persistent, au point où l’on va longtemps encore dénigrer quasiment systématiquement chacune de leurs contributions. Raison pour laquelle, sans aucun doute, d’éminentes chercheuses sont presque tombées dans l’oubli : il en est ainsi de la Française Marthe Gautier (née en 1925), qui a découvert la trisomie 21, ou de la Britannique Jocelyn Bell Burnell (née en 1943), astrophysicienne du pulsar, scientifiques dont les découvertes sont la plupart du temps portées au crédit de leur entourage masculin. La minimisation, le déni voire la spoliation des découvertes des femmes de science a d’ailleurs été mis en lumière en 1993 par l’historienne américaine des sciences Margaret W. Rossiter. Elle lui a donné un nom, celui d’« effet Matilda ».
Pour emblématiques qu’elles soient, ces scientifiques sont souvent perçues comme de simples exceptions plutôt que comme des modèles, comme Marie Curie, première et seule femme à avoir reçu deux prix Nobel. Néanmoins, depuis le milieu du XXe siècle, de nouvelles générations de femmes scientifiques ont fait surgir des problématiques de recherche dans de nombreux domaines, y compris le champ des sciences sociales, et s’y sont imposées. Elles ont marqué l’histoire par leurs contributions exceptionnelles : de la visionnaire de l’ADN Rosalind Franklin à Rachel Carson, biologiste marine et militante écologiste, en passant par Françoise Barré-Sinoussi, célèbre découvreuse du VIH, ou la psychanalyste Françoise Dolto, des femmes ont bel et bien repoussé les frontières de la science.
Mais, comment comprendre la sous-représentation des femmes dans les domaines scientifiques encore de nos jours ? Comment expliquer le peu de prix qui leur ont été attribués ? On ne compte, en effet, que 6% de femmes parmi les récipiendaires du prix Nobel et que deux mathématiciennes médaillées Fields pour 78 hommes qui le sont ! La persistance des idées-reçues serait-elle responsable de cet état de fait ? Pour vous aider à aborder cette épineuse et lancinante question, nous vous invitons à découvrir sur le site Riponne, du 22 octobre 2024 au 6 janvier 2025, notre sélection thématique ou à parcourir la liste des ouvrages qui vous y seront présentés. Bonne lecture !